Le Kid de Cincinnati (The Cincinnati Kid) - 1965
Steve McQueen (Les Sept Mercenaires, La Grande Évasion, Papillon), incarnant Eric Stone alias le Kid de Cincinnati, jeune prodige du poker de la Nouvelle-Orléans, a pour manager Shooter, joué par Karl Malden (La Loi du Silence, Le Chat à Neuf Queues, Les Rues de San Francisco).
Après moult pérégrinations, il se retrouve en tête à tête, face à Lancey Howard, rôle que tient à merveille Edward G. Robinson (mémorable Dathan, dans les Dix Commandements de Cecil B. DeMille et 1956, et Sol Roth, dans Soleil vert, de Richard Fleischer), dans une partie de poker disputée dans une variante aujourd'hui abandonnée, le 5-Card Stud.
Attention, la scène suivante révèle la fin du film.
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Ce film est le premier chef-d'œuvre du cinéma à traiter exclusivement de poker. Certes, la variante est aujourd'hui désuète, mais l'on y voit déjà le duel qui inspirera ceux de Rounders, trente ans après. D'après les experts, la main finale n'est pas si mal jouée que ça de part et d'autre. L'intrigue est douce mais tient le spectateur en haleine. Le duel final est largement à la hauteur de ce qu'on attend.
A Big Hand for the Little Lady - 1966
Le synopsis d'Allociné : Dans l'Ouest américain, un couple et leur enfant arrive dans la ville où ils veulent s'acheter une ferme. Ce jour-là, a lieu un tournoi de poker où les hommes les plus riches de la ville s'affrontent. Bien qu'il soit un piètre joueur, l'homme ne peut résister, et prend part au jeu.
Intitulé Gros coup à Dodge City dans sa version française, A Big Hand for the Little Lady est une petite gourmandise qui a plutôt bien résisté au poids des années. Le film entre dans la catégorie de ceux dont on ne parvient pas à se détacher après avoir appuyé sur le bouton Lecture.
S'il ne s'agit pas à proprement parler d'un chef-d'œuvre, le charme du film repose sur de nombreux atouts : un joli casting autour d'Henry Fonda, une ambiance western légèrement décalée, ou encore une longue partie sous forme de huis clos qui remémorera aux cinéphiles certaines références du genre.
Côté poker, la variante pratiquée est bien entendu le poker fermé, comme il est de coutume dans les films de type western. Bien qu'à aucun moment il ne vous sera donné de voir les cartes des joueurs, le poker se situe véritablement au coeur de l'intrigue du début (ou presque) à la fin.
Mais plus que le poker, A Big Hand for the Little Lady est un film sur la psychologie du jeu et, surtout, le bluff. D'ailleurs, peu de films ont depuis abordé ce thème avec autant d'audace.
Enfin, contrairement à ce que les premières scènes pourraient laisser supposer, le film s'illustre par l'originalité avec laquelle le rapport entre femmes et poker est abordé. Peut-être d'ailleurs une bonne raison de le visionner en couple !
L'Arnaque (The Sting) - 1973
Johnny Hooker, joué par Robert Redford (Gatsby le Magnifique, Out of Africa, Proposition indécente), est un tire-laine qui est amené à contacter un arnaqueur de haut vol, en la personne de Henry Gondorff, interpété par Paul Newman (La Chatte sur un Toit Brûlant, Butch Cassidy et le Kid, La Couleur de l'Argent, pour lequel il obtiendra l'Oscar du meilleur acteur, à l'occasion de sa septième nomination dans cette catégorie).
Ensemble, ils montent une arnaque en plusieurs temps, chapitrée tout au long du film, visant à venger la mort d'un ami en dépouillant un très riche malfrat, Doyle Lonnegan, dont Robert Shaw (Bons Baisers de Russie, Les Dents de la Mer) enfile le costume.
L'une des étapes de cette arnaque consiste en une partie truquée de poker fermé. L'ambiance est celle qui est dans la mémoire collective, celle des arrière-salles de salons enfumés.
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Dans cette bande-annonce, on entend The Entertainer, une musique écrite au début du vingtième siècle par Scott Joplin, et que l'Arnaque a immortalisée. À noter la participation de Dana Elcar, célèbre pour avoir joué le rôle de Peter Thornton dans la série MacGyver.
California Split - 1974
Le synopsis d'Allociné : Bill Denny et Charlie Waters n'ont qu'une passion: le jeu. Que ce soit les cartes, les dés, les courses, la boxe, ils passent leur temps à parier. Seul problème: il faut trouver l'argent.
California Split est un des rares films qui se penchent spécifiquement sur le quotidien de gamblers à plein temps, en l'occurrence le duo constitué par George Segal et l'inimitable Elliott Gould.
Au menu : du poker, mais également du blackjack, des courses de chevaux ou encore des paris en tous genres (20 $ à celui qui peut énumérer les noms de chacun des sept nains)...
À noter également la brève présence à l'écran d'une légende du poker : Amarillo Slim.
Maverick - 1994
Mel Gibson (Mad Max, l'Arme fatale, Braveheart) interprète le rôle-titre, un joueur de poker professionnel, qui participe à un énorme tournoi de poker, à bord d'un bateau naviguant sur le Mississipi. Il est accompagné dans ses péripéties par Annabelle Bransford, jouée par Jodie Foster (Le Silence des Agneaux, Nell, Panic Room).
Cette comédie est drôle, légère, et son histoire est pleine de rebondissements. Un moment de détente à avoir vécu, et une main de poker finale insensée et rocambolesque, digne d'un dessin animé.
Lock, Stock and Two Smoking Barrels - 1998
Affublé d'un titre français peu ragoûtant (Arnaques, crimes et botanique), ce film n'est pas à proprement parler consacré au poker. En revanche, contrairement à la plupart des productions autour de votre jeu favori, il s'agit d'un bon film, ce qui suffit à justifier sa présence dans cette liste.
Le synopsis d'Allociné : "Eddy, un joueur invétéré, s'apprête à participer à la plus grosse partie de cartes de sa vie avec un enjeu de cent mille livres, somme qu'il a durement amassée avec ses trois acolytes, Tom, Baco et Soap. Eddy est considéré comme l'un des meilleurs joueurs du circuit, mais la partie s'avère être un coup monté à l'issue duquel il doit cinq cent mille livres à son adversaire Hatchet Harry. Ce dernier lui donne une semaine pour réunir cette somme, sinon il aura les doigts coupés. Seul JD, le père d'Eddy, pourrait annuler la dette en cédant son bar à son vieux rival, Harry".
Les plus observateurs auront noté que ce synopsis ne fait pas mention d'une partie de poker, mais de cartes. Il s'agit pourtant bel et bien de poker, mais dans une variante aujourd'hui méconnue : le 3 Card Brag.
Les joueurs (Rounders) - 1998
Mike McDermott, interprété par Matt Damon (Will Hunting, Le Talentueux M. Ripley, Raisons d'État, est un joueur de poker qui étudie le droit. Mais, après avoir perdu tout son argent face à Teddy KGB, joué par John Malkovitch (Des souris et des hommes, L'Homme au masque de Fer, Burn After Reading), il retrouve un ancien ami, Lester l'Asticot Murphy, qu'Edward Norton (Larry Flynt, American History X, Fight Club) joue de manière splendide.
Il se retrouve à fréquenter les pires bas-fonds des rues sombres des États-Unis, jouant à toutes les variantes possibles, plumant les pigeons un à un, jusqu'à pouvoir rembourser l'argent que son ami doit à son ennemi juré.
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Ce film a créé un premier boum et a attisé la flamme des joueurs de poker casaniers, relançant l'organisation de parties à domicile.
Attention, le bankroll management suivi par Mike McDermott n'est pas recommandé.
High Roller, The Stu Ungar Story - 2003
Réalisé par A.W. Vidmer peu avant le boom Moneymaker, le biopic consacré à Stu Ungar n'a pas bénéficié d'un budget important et cela se ressent à de nombreux égards.
En dépit d'une réalisation loin d'être irréprochable et de scènes de jeu insuffisamment mises en valeur, le film fait office de curiosité et mériterait presque un visionnage à ce seul titre.
Casino Royale - 2006
James Bond, interprété par Daniel Craig (Lara Croft : Tomb Raider, Munich, Quantum of Solace), fait à peu près le tour du monde à la poursuite des méchants, et termine au Monténégro, inscrit à une partie de Texas Hold'Em aux enjeux démesurés (10 millions de dollars la cave).
À la fin d'une partie endiablée, une main digne des meilleurs scénaristes de science fiction est dévoilée.
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Lucky You - 2007
Arpentant les casinos de Las Vegas où il est bien connu, Eric Bana (Troie, Munich), sous les traits de Huck Cheever, est ce qu'on appelle un gambler. Il gagne beaucoup et perd tout dans la foulée.
Il séduit néanmoins la belle Billie Offer, jouée par Drew Barrymore (E.T. l'extra-terrestre, Scream, Charlie et ses drôles de dames), et lui fait découvrir les joies d'être joueur professionnel de poker.
Le film s'achève à la fin du main event des World Series of Poker 2003.
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Mettant plus en avant l'aspect romantique de l'histoire que le poker, Lucky You a utilisé Doyle Brunson comme conseiller technique, ce qui se ressent dans la qualité et la vraisemblance des mains jouées, ce qui est rarement le cas au cinéma.
The Grand - 2007
Le synopsis d'Allociné : À Las Vegas, un propriétaire de casino don juan et cocaïnomane tente de sauver son établissement de la saisie en participant à un des plus grands tournois de poker.
Cette comédie complètement déjantée ne séduira sans doute que le spectateur averti (entendez par là le joueur de poker). Ca tombe plutôt bien : si vous lisez cette page, vous faites probablement partie de cette catégorie.
Le film prend la forme d'une succession de saynètes qui, dans l'ensemble, font plutôt mouche. Ici, les références satiriques et personnages caricaturaux sont complètement assumés.
Woody Harrelson occupe le haut de l'affiche, mais les visages connus du circuit sont nombreux : de Gabe Kaplan à Phil Laak en passant par Doyle Brunson et Phil Hellmuth (vous aurez même droit à une courte apparition de Shannon Elizabeth, plutôt amusante).
Et justement, côté poker, les mains proposées sont peut-être les plus réalistes auxquelles il ait été donné d'assister dans une production hollywoodienne. Un comble dans un film où tous les traits sont volontairement grossis à outrance.
Au final, il est peu probable que ce film restera imprimé dans votre mémoire plus de quelques heures, mais si vous êtes un observateur attentif du circuit international il est possible que vous passiez un bon moment l'espace d'1h40. Au moins par intermittence.
Deal, the Game is On - 2008
Le synopsis d'Allociné : Quand un ex-accro du jeu apprend à un étudiant les rudiments des jeux de cartes, il se retrouve plongé dans le monde du poker, où son protégé se trouve être son plus grand adversaire...
Commençons d'abord par les atouts du film (ça ne constituera de toute façon qu'un bref préambule) :
- la présence au casting de Shannon Elizabeth ;
- le passage à l'écran d'un nombre incalculable de stars du circuit ;
- une mention du poker en ligne, aussi brève soit-elle, qui reste plutôt rare dans les productions de ce genre ;
- des mains moins ridicules que dans certains autres films (mais une succession de set vs double paire ou set vs quinte...) ;
- la présence au casting de Shannon Elizabeth.
Voilà, c'est à peu près tout. Pour le reste, ce film cumule scénario cousu de fil blanc (il s'agit d'ailleurs d'une simple transposition au poker du synopsis de La Couleur de l'Argent), des grosses ficelles, des personnages caricaturaux (et pas qu'à moitié)...
Sur ce dernier plan, Deal fait très fort : de l'adepte du poker en ligne représenté sous les traits d'un geek puceau, au vieux livetard qui ne jure que par les tells. Aaaah... les tells... autant vous dire tout de suite qu'aucun autre film n'a traité le sujet avec autant de profondeur...
À ce propos, le personnage interprété par Burt Reynolds sauve sans doute le film en offrant la possibilité d'un visionnage au second (voire au 3e) degré. Les Razzie Awards ne s'y sont pas trompés en accordant à l'acteur une nomination amplement méritée. Personnage aux mille clichés, dialogues grand-guignolesques et, surtout, une capacité à exprimer une émotion inadéquate malgré un visage amorphe et momifié par la chirurgie esthétique : toute la palette du vieux loup de mer se trouve ici exploitée. Un régal !
Au final (en parlant de final, celui du film est une purge), Deal laissera sans doute au spectateur averti le sentiment d'avoir subi un spot publicitaire d'1h30 à la gloire de PokerStars (sorti un an plus tôt, The Grand était allègrement estampillé PartyPoker). Toute la team pro ou presque est présente au casting, et rares sont les scènes dans lesquelles le logo de l'opérateur n'apparait pas.
Pour toutes ces raisons, Deal reste un OVNI dans le paysage cinématographique de ces dernières années. Visionnage recommandé à tous les addicts du poker qui cherchent à décrocher !
Poker King - 2009
Le synopsis : Jack Chang est l’héritier d’un empire du jeu à Macao. En mauvais termes avec sa famille, il s'exile au Canada et prospère sur le poker en ligne avant d'être rappelé à Macao à la mort de son père. Le gérant de l'empire familial estime que Jack n'est pas assez mature pour reprendre les rênes du pouvoir. Il décide le tester.
Surfant sur la popularité grandissante de Macao, Poker King n'est pourtant pas parvenu à rencontrer le succès en dehors du continent asiatique. La faute à plusieurs défauts rédhibitoires, dont un scénario convenu et des traits grossis à l'extrême chez les personnages.
À réserver aux inconditionnels du cinéma hong-kongais.
La Tueuse - 2010
Le synopsis d'Allociné : Mathilde est une trentenaire d'aujourd'hui, en galère d'emploi malgré son diplôme d'infirmière. Elle découvre le poker au moment où elle tombe enceinte de l'homme qu'elle aime. Son surnom, la tueuse, elle le doit à la manière implacable dont elle élimine ses adversaires autour d'une table. Mais voilà... Mathilde devient accro, et c'est toute sa vie qui bascule...
Diffusé par ARTE en 2010, le film de Rodolphe Tissot a bénéficié du soutien de Manuel manub Bevand dans le cadre de la mise en scène des scènes de poker, soutien qui leur confère une crédibilité et une vraisemblance appréciables. Celui-ci joue même un petit rôle dans le film.
Le forum regorge d'informations et d'avis sur La Tueuse, qui a par ailleurs fait l'objet d'une émission spéciale de Club Poker Radio.
Le film est tourné de manière assez crue, sans lissage outrancier, et est avant-tout mathildocentrique. Adrienne Pauly est parfaite dans son rôle de droguée du poker. La Tueuse passe brutalement de "très décousu" à "habilement raccordé", les interactions entre les personnages et Mathilde apparaissant subitement, après l'événement central et capital de l'intrigue.
Un film à voir, le traitement du poker étant réalisé d'un point de vue unique dans l'histoire du cinéma. Adieu déjà-vu, resucées, poncifs et autres plagiats : La Tueuse est un film franc et cru, unique et prenant.
Players (Runner Runner) - 2013
Le synopsis d'Allociné : "Richie, étudiant à Princeton, joue au poker en ligne pour payer ses frais de scolarité. Lorsqu'il se retrouve ruiné, persuadé d'avoir été arnaqué, il décide de s'envoler pour le Costa Rica afin de retrouver la trace d'Ivan Block, le créateur du site. Ivan prend Richie sous son aile et l'amène à intégrer son business."
En dépit d'un casting prestigieux articulé autour de la paire Ben Affleck - Justin Timberlake, ce film de Brad Furman (La Défense Lincoln) n'a pas rencontré le succès au box office. La faute notamment à un scénario indigent, simple resucée de bien d'autres thrillers hollywoodiens.
Le poker en ligne n'est pas placé ici au cœur de l'intrigue. Une histoire de super user account, inspirée de récents scandales, fait simplement office de prétexte pour tresser un duo "mentor mafieux / protégé ambitieux". Côté jeu, quelques scènes sont bien distillées lors de la première quinzaine de minutes du film, mais c'est à peu près tout.
Quant aux clichés et autres facilités narratives, ils sont légion : la victime qui s'envole pour le Costa Rica à la rencontre du patron véreux de la room ; le traitement ultra superficiel du sujet des coulisses des rooms et de l'affiliation, qui avait pourtant le mérite d'être inédit ; et de manière plus générale une bonne moitié des répliques des deux personnages principaux.
Pire, le rythme du film semble sans cesse à contre-temps. À plusieurs reprises, on passe du coq à l'âne en deux temps trois mouvements sans prendre la peine de poser un cadre et de creuser la psychologie des personnages. Mention spéciale à la transition de deux minutes chrono entre le statut de victime et celui de bras droit du grand manitou de la room pour le personnage campé par Justin Timberlake.
Visionnage plus que dispensable donc, à part peut-être pour profiter un peu des beaux yeux de la sublime Gemma Arterton.
Conclusion
Le poker, depuis un demi-siècle, a créé un grand nombre de vocations : en effet, plusieurs joueurs aujourd'hui professionnels ont confié avoir attrapé la fièvre du poker en regardant l'un des films présentés ici.
Bien que les mains cruciales soient plus souvent issues des fantasmes des scénaristes que de la réalité des tapis verts, l'ambiance des parties qui s'y trouvent véhiculées est aujourd'hui plus saine qu'auparavant, et on peut s'en réjouir, nous qui savons que le poker d'aujourd'hui n'a rien à voir avec celui pratiqué par les Texans armés jusqu'aux dents des années 70.